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Abelé 1757
1757

Rencontre avec Christian Vabret, Meilleur Ouvrier de France

03 octobre 2022

Meilleur Ouvrier de France, pâtissier, boulanger, globe-trotter, formateur, entrepreneur… Depuis le début de sa carrière, Christian Vabret collectionne les titres. Très tôt, ce fils de boulanger aurillacois se destine au métier du fournil. Une passion qui l’emmènera jusqu’en Amérique du Sud et en Asie pour partager son amour de la boulangerie. Pour la Maison Abelé 1757, l’ambassadeur du bon manger revient sur son parcours, l’excellence du titre de M.O.F et son envie de transmettre.

Comment est venue cette passion pour la pâtisserie ?

En tant que fils d’artisan, j’ai eu la chance d’être dans le fournil de très bonne heure. Quand on est petit, c’est magique : les parents s’agitent, le personnel fabrique le pain et les pâtisseries… On voit plein de choses et c’est très exaltant. Cela peut paraître banal, mais tous ces événements marquent le début d’une vie.

Très tôt, j’ai également compris que ce métier avait une aura auprès de la population. Un commerçant apporte un service aux gens. Mais le boulanger apporte quelque chose d’incomparable. Rapidement, je me suis pris au jeu en regardant les opportunités que pourrait m’apporter un jour ce métier, surtout avec la boulangerie. À l’époque, ce monde n’était pas « marketé » comme aujourd’hui. Pour moi, il s’agissait d’un produit qui pouvait dépasser toutes les frontières géographiques et sociales, passer de la table du président de la République à celle de l’ouvrier… C’est un produit avec des valeurs fortes si on le travaille bien.

Tout cela m’a donné l’opportunité de voyager et d’apporter la boulangerie française et le savoir-faire unique de la fermentation aux quatre coins de la planète. Un métier qui demande, à l’instar du fromage et du vin, passion et patience.

Quel est votre parcours ?

Ma formation initiale s’est faite avec mon père de façon très empirique. Entre ouvriers. À l’époque, il n’y avait ni école, ni cours pour se former. Cela m’a beaucoup interrogé « Comment un métier aussi beau, n’a ni écrit, ni formation ? Comment transcender tout ça ? ». Il a fallu attendre plusieurs années avant que les centres de formation d’apprentis ne voient le jour.

Ce constat a fait naître en moi l’envie de fonder mon école professionnelle. À la trentaine, je me suis lancé. Une opportunité qui m’a permis de construire des relations, des amitiés et des circuits à travers le monde pour dispenser un savoir-faire.

Quelles sont vos sources d’inspiration ?

Deux sources d’inspiration sont omniprésentes chez moi. En premier lieu, il y a l’approvisionnement des produits et la façon de les mettre en valeur. Les consommateurs cherchent à acheter via des circuits courts. Notre but est d’avoir des produits locaux très typés, qui rappellent une histoire ou un territoire, tout en réussissant à s’adapter à un monde moderne qui évolue sans cesse. Nos produits sont plus légers et goûtus qu’auparavant.

Ensuite, il y a la nouveauté. Les gens aiment découvrir de nouvelles variétés. Même si votre pain traditionnel est bon, les consommateurs finiront un jour ou l’autre par se lasser. Rappelons qu’il est désormais un accompagnement à part entière des mets. Il faut réussir à proposer un pain qui s’adapte au menu, qu’il s’agisse d’un foie gras ou d’une viande en sauce.

Et cette philosophie du bon et de la nouveauté se diffuse dans notre quotidien. Avant notre rencontre, nous échangions encore avec mon chef pâtissier sur une nouvelle pâtisserie à l’effigie de Marie-Antoinette. Un macaron surmonté du buste de l’ancienne Reine de France.

C’est quoi être MOF selon Christian Vabret et quels ont été les sacrifices pour arriver à un tel niveau ?

C’est avant tout la reconnaissance de ses pairs. Après avoir été reçu aux concours et examens de base, j’ai voulu obtenir le concours d’excellence. Chaque édition du Meilleur Ouvrier de France est espacée de trois années de travail intense. Un challenge qui demande beaucoup de sacrifices. Le jour, vous devez nourrir votre famille et donner du travail à vos salariés. La nuit, vous passez votre temps à vous perfectionner. Des heures entières à refaire les mêmes gestes, créer des nouvelles recettes et se dépasser pour être le meilleur. C’est une pression énorme.

Lors de mon premier essai, j’ai terminé à la seconde place avec la médaille d’argent. Déçu, je suis repartie au combat pour trois années supplémentaires, soit près de sept années à travailler jour et nuit pour le titre. Des années certes passionnantes, mais tout aussi éprouvantes. La famille et l’entourage doivent être solides pour vous accompagner dans cette épreuve.

La pâtisserie est une discipline très exigeante, parfois plus dure et contraignante que la cuisine. Comment gardez-vous cette excellence dans votre pratique de MOF ?

L’excellence est avant tout un état d’esprit. Et ce, dès le réveil ! La période que nous vivons actuellement apporte une augmentation du coût des matières premières. Certains chefs d’entreprise pourraient chercher à grignoter sur la qualité des produits pour conserver leur rentabilité.

En tant que Meilleur Ouvrier de France, nous voyons la situation différemment. Nous devons toujours chercher à proposer les meilleurs produits et la meilleure façon de faire pour satisfaire nos clients. Dans la pratique, cela nous pousse à nous adapter avec des produits de saison plus accessibles. C’est une contrainte qui sublime le titre de MOF.

Au-delà des produits, il faut rappeler que l’être humain est la plus belle des richesses. Nous avons la chance d’être entourés de collaborateurs très motivés. Grâce aux boutiques et aux centres de formation en France, en Chine et au Chili, nous pouvons dénicher des talents. Il est primordial de rester en éveil auprès de jeunes qui veulent progresser dans l’entreprise. C’est grâce à eux et aux équipes en place que nous pouvons progresser et rester les meilleurs au fil des années.

Ce sont ces mêmes jeunes qui repartent avec un savoir-faire et un savoir-être acquis auprès des meilleurs. Le monde de la boulangerie-pâtisserie est une grande chaîne de transmission. Une grande famille dont on est fier.

Après autant d’années de carrière, qu’est-ce qui vous fascine encore dans votre métier ?

Après tant d’années, il serait très facile d’être blasé de notre métier. Nous avons vu et fait tellement de choses que l’usure et la fatigue pourraient nous gagner facilement. Mais quand on croise le regard satisfait d’un client ou qu’il vous complimente, on se dit que ça vaut la peine de continuer tous les jours. C’est une grande richesse. Il ne me viendrait pas à l’esprit de relâcher mes efforts. Ma philosophie est plutôt dans la quête de l’excellence : « Qu’est-ce qui va plaire à nos clients ? ». Pourquoi se lever le matin si ce n’est pour ce qui nous transcende ?!

Il serait facile de prendre quelques jours de repos pour ne rien faire. À la place, je préfère rendre visite à un collègue ou à un producteur qui va me donner l’idée d’un nouveau produit ou me convaincre de tenter quelque chose de nouveau. Ce sont ces rencontres qui nous motivent tous les jours. Rappelons aussi que notre métier évolue au rythme des saisons, des rencontres, des fêtes… Nous sommes toujours en ébullition. Un événement se termine qu’il faut déjà se projeter sur le prochain.

Quels sont vos mentors et pourquoi ?

Indéniablement, mon père avec qui j’ai appris le métier. À mes débuts, il n’y avait pas ou peu de gens connus en boulangerie. Il était difficile de se reconnaître chez des confrères qui m’auraient guidé. À l’exception de mon père, j’ai fini par trouver l’inspiration dans la cuisine de Paul Bocuse. Longtemps, j’ai suivi son parcours dans les revues et les reportages. Tout ce que je pouvais capter me poussait à m’interroger : « Comment transposer ça dans la boulangerie ? ».

J’ai le souvenir d’aller à Lyon pour découvrir les coulisses du Bocuse d’Or. L’une des plus grandes compétitions internationales de cuisine. Quatre ans plus tard, je faisais venir des amis du monde entier pour la première édition de la Coupe du Monde de Boulangerie.

Au-delà de son métier, Paul Bocuse m’a inspiré par son histoire. À l’époque, il répétait « Sortez de vos fourneaux, passés en salle, apportés la bonne parole ». Pour montrer l’exemple, il a pris son bâton de pèlerin pour faire connaître la cuisine française à l’étranger. Ce personnage m’a servi d’exemple pour oser. Dès que cela a été possible, je suis sorti du fournil pour passer de l’autre côté de la barrière et diffuser la bonne parole.

À l’image du Champagne qui est mondialement connu, quelle est aujourd’hui la place de la pâtisserie française dans le monde ?

Nous avons la chance d’avoir des métiers qui s’exportent très bien. La boulangerie et la pâtisserie sont très à la mode. Nos produits sont non seulement bons et goûteux, mais surtout harmonieux et très esthétiques. Cela n’est pas toujours le cas dans d’autres pays. Les États-Unis font parfois le buzz avec des choses très visuelles, mais le produit n’a pas ou peu de goût.

À l’inverse, nos amis asiatiques sont réputés pour leur grande précision. Ils ont réussi à s’inspirer de l’excellence française, voire à faire mieux que nous. Ils ont compris que prendre le temps était primordial. Malheureusement, c’est une population qui craint le sucre et les pâtissiers ont dû adapter les recettes à leur palais. Le résultat est finalement plus neutre.

Christian Vabret, c’est également une histoire de transmission avec vos écoles. Pouvez-vous nous dire en quoi cette partie de votre métier est importante ?

Lorsque vous êtes artisan, il peut vous arriver de travailler seul. Vous passez vos nuits à ne parler qu’à vous-même et à la matière. C’est très intime comme atmosphère. À l’inverse, le jour où vous avez un compagnon, votre travail se nourrit d’échanges et, n’ayons pas peur des mots, parfois d’affrontements.

Mais par-dessus tout, plus vous êtes entourés, plus vous êtes motivés à faire passer des messages : rigueur, attention, persévérance… C’est ce qui fait la richesse de nos métiers. Ce sentiment d’exaltation, je le vis au quotidien dans mon école. Nous recevons des personnes du monde entier, des amateurs et professionnels qui viennent se former ou se perfectionner. Nos échanges sont formidables et commencent le matin au travail pour se terminer le soir autour d’une coupe de champagne.

Ce sont ces moments qui forgent nos amitiés. Depuis le début de ma carrière, j’ai eu la chance de faire des rencontres professionnelles improbables. La transmission se transforme alors en amitié. Les gens qui gravitent dans cet univers sont juste passionnés par ce qu’ils font.

En quoi le temps est-il un ingrédient à part entière en pâtisserie ? Comment impact-il votre métier ?

Nos métiers nous imposent de mesurer le temps pour plusieurs raisons. En boulangerie et en pâtisserie, le temps est crucial. Nous devons toujours réfléchir et anticiper le nombre de produits pour le jour suivant. À l’instar du vin et du fromage, le temps est une mesure exceptionnelle qui va façonner de bons produits. D’une certaine manière, nous surfons sur la vague du temps.

Personnellement, j’ai l’impression d’être toujours jeune (rire). C’est plutôt mon physique qui me trahit et m’offre moins de possibilités. En tant que chef d’entreprise, j’ai toujours envie de lancer de nouveaux projets, mais je m’aperçois que le temps passe… et qu’il m’en faudrait toujours plus. Pourtant, j’exerce toujours mon métier comme si j’avais encore 20 ans. Jusqu’ici, ma vie est remplie de bonheur.

Texte – Geoffrey Chateau | Photo – Julien Gérard-Maizières

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